Si l’on prend l’art in situ au sérieux, on peut essayer de repenser la situation d’une œuvre dans son concert. Comment suborner la continuité du spectacle, comment renverser le rapport de la pièce à son environnement ? L’idée de openings est de détourner la logique séquentielle du concert pour former le concert de l’intérieur. Au lieu de restreindre l’invention à la marge des pièces de répertoire, le temps du concert deviendrait celui de la création, par laquelle l’écoute du répertoire s’en trouverait positivement renouvelée.
Openings est donc une composition discontinue qui se déploie à l’intérieur d’un concert, pour l’ouvrir en six endroits. Chaque passage est plus long que le précédent, jusqu’à laisser entendre une plage de six minutes, pour un total d’une dizaine de minutes réparties dans le concert. Le rythme croissant d’apparition de la pièce permet aussi à l’auditeur d’y rentrer progressivement, de la saisir par le contraste variable qu’elle établit avec les autres œuvres – dont on peut dire qu’elle forme à chaque fois une ouverture au sens musical.
Entrelacée avec des œuvres du répertoire classique, openings est une ouverture à double titre, qui permet d’abord l’irruption du doute et de l’intranquillité dans une musique familière, puis qui s’en éloigne par le travail sonore, comme une issue de secours pour échapper au legs classique.