prima
pour flûte (2007)
Gu Hongzhong, Festivités nocturnes de Han Xizai

Durée : 10 min.

S’il peut être acté que la musique n’est pas identifiable au langage – elle lui est à la fois inférieure par ses moyens d’expression et supérieure par ses moyens d’impression, elle peut entretenir avec lui des rapports persistants dont le compositeur doit se dégager pour étendre les possibilités de son artisanat ; Prima est une tentative de fuir la narration comme trace du langage et de construire un univers musical dans le temps de l’audition.

Pour aller à l’opposé de la narration, il faut non pas laisser aller la musique au gré d’un temps irréversible, mais au contraire canaliser son énergie dans des structures aptes à déranger les fonctions ordinaires de nos oreilles encore par trop romantiques, habituées à attendre, saisir puis oublier les personnages d’un flux dramaturgique. Ainsi, il n’y a pas de développement dans Prima ; il y a simplement trois plans, entre lesquels s’opposent épuisement combinatoire et rupture formelle, dont la seule juxtaposition fait l’unité de l’œuvre.

Prima, en italien, c’est bien sûr la première d’une œuvre, mais c’est aussi d’abord, la marque de ce qui vient en premier. En essayant de s’éloigner des modes de perceptions acquis pour construire les siens propres, Prima est dans le refus du simple énoncé ; il reste l’esquisse de lui-même jusqu’au bout où, figeant le matériau, le fait entendre dans une certaine permanence, comme si le temps n’avait pas d’emprise sur lui et ne pouvait y mettre fin.

Comme toujours, une œuvre n’atteint jamais ses objectifs, elle est toujours au-delà ou en-deçà. La musique est toujours à côté, parce qu’elle n’est pas notre langage, elle imprime ce qu’elle est dans notre conscience et disparaît, nous laissant dépourvu, dans le silence, de la possibilité de la saisir, indéfiniment.

prima est dédié à la flûtiste Sophie Dardeau

Création

Le 7 juin 2008 par Sophie Dardeau, soliste de l’ItinéraireLux – Scène nationale de Valence

prima (extrait)