stoa
pour quatuor à cordes (2019 - 2020)

Durée : 22 min.

Stoa est né d’une réflexion crépusculaire sur la musique, dans le temps d’une humanité qui envisage avec science et raison sa propre fin. Le compositeur, dans une mesure dérisoire, s’inquiète aussi de ce qui advient de l’autonomie musicale acquise jusqu’alors, qui a conduit à l’exploration de phénomènes sonores de plus en plus riches. Face à lui, des mouvements de dissolution sont à l’œuvre, qui tendent à ravaler la musique au rang de souvenir, à la cantonner à d’anciennes modes ou à la noyer dans un flot multimédia dont elle ne serait que l’auxiliaire.

Dans Stoa, l’hypothèse de la disparition du quatuor à cordes devient un processus de composition, qui ne cherche pas à détruire la formation classique de Haydn mais à la tirer hors d’elle-même, spéculant sur les interstices possibles qu’aurait laissé l’histoire, ne renonçant pas à la possibilité de sons nouveaux. La pièce tire son titre de l’architecture grecque antique, où la stoa était la partie couverte d’un bâtiment, entre la façade et les colonnades. C’est sous l’une d’elles, la Stoa Poikilè d’Athènes, que naquit le stoïcisme, l’école du portique, qui accorda sa conception du destin à celle d’une exigence morale, par opposition à tout renoncement ou passion triste.

Les corrections optiques des temples (l’entasis des colonnes, les incurvations, les décalages rythmiques) sont autant de procédés qui inspirent la mise en perspective du quatuor, au sens propre comme au figuré. La position traditionnelle des musiciens en demi-cercle, coordonnée par les regards, se redresse vers une mise en façade des interprètes, debout comme des colonnes face au public, tandis que les sourdines simulent des distances et des profondeurs de champ sonore qui dépassent l’architecture de la salle de concert. L’écriture change pour permettre une synchronisation à l’oreille ; les instrumentistes disparaissent un à un, jusqu’à ce qu’un seul demeure sur scène, jouant avec le souvenir lointain du quatuor.

Stoa est dédié au Quatuor Adastra

Création

Le 3 octobre 2020 au Festival Musica de Strasbourg

Extraits